Histoires vraies du Dedans

L’oncle avait la main froide, par Koko

23 octobre 2021

Temps de lecture : 2 minutes

Cette histoire est tirée du volume 1 des Histoires vraies du dedans dans le cadre des ateliers menés en 2015-2016 dans les centres pénitentiaires des Baumettes à Marseille et Toulon-La Farlède, le centre de détention de Tarascon et à la Valentine, dans l’établissement pénitentiaire pour mineurs.

 

Lagoj, en Roumanie.

Je vous raconte cette histoire qui m’est arrivée : j’étais enfant. J’étais seul à la maison. C’était à Lugoj, là où j’habitais avant. J’avais dix ans tout au plus. On était voisins avec mon oncle et la clôture qui nous séparait était cassée. C’était dans un village, pas en ville, et c’était comme ça : des maisons avec un jardin séparé par une clôture.

J’étais donc tout seul et je regardais la télé. Les autres étaient de l’autre côté, chez mon oncle, et ils discutaient. Soudain le robinet s’est ouvert dans la cour. Je suis sorti. Mais là, personne. Et je peux vous dire que la suite m’a choqué : la porte de la chambre, derrière moi, elle s’est ouverte. Et c’est pas possible qu’il y ait eu un courant d’air, il n’y avait pas de vent. J’ai fui chez mon oncle : « Regarde ce qui arrive, regarde ce qui arrive ! ». Ils m’ont répondu : « Allez, petit, rentre à la maison, qu’est-ce qui te prend ? ». Ma sœur est venue avec moi, accompagnée de mon cousin. Il est resté le temps qu’il est resté avec moi puis il est rentré chez lui.

Le lendemain, il nous a raconté qu’il avait vu son oncle, qu’il lui avait serré la main – vu qu’on se salue quand on se croise : « Salut », « Salut », et on se tend la main. L’oncle avait dit qu’il cherchait quelqu’un. Mon cousin en lui serrant la pince s’était rendu compte qu’elle était très froide. Ensuite, on a appris que son oncle, l’oncle de mon cousin, était mort la veille. Je vous jure. Sa mère était en larmes, tout le monde pleurait, et ils disaient : « Tu vois, ce que tu as raconté, c’est vrai : c’était son oncle, le mort, celui qui est venu ouvrir le robinet chez toi ! ». Je vous jure, ces choses sont réelles. Il y en a qui disent c’est pas vrai qu’on puisse voir le mort. Le mort, il existe avec les esprits, je vous le jure. J’en ai vus, pour vous parler comme ça !

Koko, Marseille 2015. Traduit du roumain par Laure Hinckel.