C’est l’histoire de ma grand-mère qui s’appelle Chantal. Elle fait partie d’une association de bénévole (JALMALV : « Jusqu’À La Mort Accompagner La Vie ») dont l’objectif est de rendre visite à des malades qui sont en fin de vie ou en grande souffrance. Elle rencontre toutes les semaines des malades qu’elle suit deux fois, six fois, dix fois et parfois elle les accompagne vraiment jusqu’à leur mort.
Un jour elle a accompagné une dame qui s’appelait Jeanne, qui avait soixante-dix ans et qui était vraiment très malade, mais pas complètement en fin de vie. Jeanne disait « J’en ai assez de la vie, je veux mourir. » Ma grand-mère lui demanda ce qui lui faisait dire ça. Elle lui raconta donc qu’elle avait deux fils, un fils aîné qui s’appelle Patrick et un deuxième fils, Sébastien.
Patrick avait rencontré une jeune femme qui n’était pas du tout de son milieu social. Un jour sa fiancée dit à Patrick : « Il va falloir que tu choisisse, sois de vivre avec moi et de quitter ta famille, sois ta famille. Parce que je ne peux pas vivre autour d’eux, on est trop différents, il faut que tu fasses un choix. » Et Patrick choisit de rester avec son amour, et de ne plus rendre visite à sa mère, de ne plus voir son frère, et d’ignorer tout le monde… Jeanne en voulait beaucoup à son fils, de plus elle ne connaissait pas ses petites filles : deux petites jumelles qui avaient trois ans. Sébastien, en voulait beaucoup à son frère également, parce qu’il avait provoqué une rupture dans la famille. Sébastien et sa mère étaient très attristés et lui en voulaient énormément. En entendant les paroles de Jeanne, Chantal aussi était très triste. Le rôle d’écoutantes, c’est en principe vraiment d’écouter et de ne rien faire d’autre. Simplement accueillir les paroles de ces personnes qui sont en fin de vie pour qu’elles sachent qu’elles sont bien entourées. Elles ne font pas partie de leur famille ni du personnel soignant. Donc les malades ont plus facilement tendance à se confier à elles, et normalement elles n’ont aucune action à entreprendre. Ma grand-mère était vraiment malheureuse de cette histoire… Un jour elle rencontra une aide-soignante, et lui demanda si elle voyait quelquefois Sébastien, le deuxième fils de Jeanne. Elle lui répondit qu’elle le voyait souvent, qu’il venait tous les jours. Et donc Chantal expliqua l’histoire de Jeanne à l’aide-soignante même si elle n’aurais jamais dû le faire. La confidentialité est très importante dans son rôle d’accompagnatrice. Elle ne devrait jamais faire part à qui que ce soit de ce que le malade leur a raconté. Ma grand-mère lui demanda si elle pouvait faire la rencontre de Sébastien. L’aide-soignante l’autorisa. Le lendemain, Chantal expliqua au plus jeune fils de Jeanne, combien sa maman était malheureuse de ne pas connaître les jumelles de son fils aîné. Elle lui proposa de demander à son frère de venir avec les jumelles avant qu’il ne soit trop tard. Au début, Sébastien ne voulait rien entendre parce qu’il en voulait vraiment trop à son frère. Il avait juré que ce ne serait pas lui qui reprendrait contact. Mais finalement il se rendu compte que pour sa maman c’était un bien fait. Donc le lendemain il alla voir son frère qui mit pas mal de temps à répondre à son invitation. Mais finalement tout le monde alla à l’hôpital : Patrick, sa femme qui, au début, s’y était opposé, et les deux petites filles de trois ans. Ce n’était pas pour elles très enthousiasment de connaître leur grand-mère en cet état. C’était très dur. D’autant que Jeanne pleura beaucoup d’émotion en les voyant. Elle les serra dans ses bras. Et trois jours après elle se laissa aller dans la mort sereinement parce qu’elle avait quand même pu embrasser ses deux petites filles et revoir son fils.
Sur le moment, Chantal s’en voulait beaucoup parce qu’elle était allé au-delà de son rôle, mais après elle était profondément heureuse parce qu’elle avait permit à cette femme de mourir tranquillement, réconciliée avec son fils aîné. Elle est partie heureuse.
Julie Bournisien de Valmont – Texte / Text
Histoire écrite en français / Story written in French