Barcelone, mardi 13 décembre
Angele Herruzo a un français hésitant et cette histoire, qu’il a malgré lui simplifiée, ne serait pas la même s’il nous l’avait racontée en catalan. J’essaye de retranscrire au plus près, sans caricaturer, et évidemment pas pour me moquer : limité dans une langue étrangère, Angele nous a dit l’essentiel :
C’était la deuxième année de médecine. J’ai décidé de louer. Une fille partait et j’ai pris sa chambre. Les deux autres locataires de l’appartement étaient en vacances cette semaine.
La fille qui m’a laissé sa place m’appelle, me dit que des amis à elle vont rester quelques jours. Je m’endors. A minuit, beaucoup de bruit me réveille : ce sont eux.
Le lendemain je me lève, prépare le petit déjeuner et vais le manger dans le salon. Un gros chien me regarde manger. Quatre personnes dorment par terre.
Je vais travailler jusqu’à 8 heures. Quand je rentre, il y a deux gros chiens et un petit. Le lendemain le petit a chié dans le salon, il a la diarrhée et il court partout, il glisse sur sa merde, je recueille son maître et je dis : tu dois nettoyer.
Je suis de garde 24 heures. Je rentre et je me couche. Mais un chien aboie. Je me lève : le gros chien veut pisser dehors. Je le sors.
Quand je rentre, le maître du chien a nettoyé la flaque de pisse. Il me dit : assieds-toi. Nous voulons te dire quelque chose. Nous pensons louer chez toi si tu es d’accord.
Je lui dis que je ne suis pas seul à décider. Je dois appeler les deux autres locataires. Elles ne sont pas d’accord.
Ils partent avec les chiens, mais celui qui dessinait très bien a oublié la laisse. Le maître du petit chien. Je l’appelle. Il remonte. Sur la table, il a laissé une caricature : un CRS qui donne un coup de pieds dans un homme : Hospitalité Catalane.
Eux étaient andalous. Moi je suis catalan. Mon père est andalou.
En partant, les chiens ont chié dans le hall. J’ai dit : nettoyez avant que les voisins se plaignent. Mais j’ai dû nettoyer toute la merde.
Un an plus tard, le maître du petit chien a eu un accident. Il est tétraplégique. Il ne peut plus dessiner.
Encore une histoire de merde, cette fois de chien, on s’améliore, mais la série marron continue… Si je dis que la Catalogne est un pays scatophile, ne fais-je pas un peu un raccourci ?…. Tout le problème des généralités…
Aujourd’hui encore, les Catalans disent les « immigrés » en parlant des andaluces ou des gallegos. Jusqu’à récemment, l’immigration était interne au pays. Quelques Marocains, des Latinos, mais qui finalement représentaient peu en terme de population. Barcelone s’est construite et a fait sa révolution industrielle (en avance pour l’Espagne) avec de la main d’œuvre andalouse et autre, comme en France au XIXe les maçons de la Creuse, les Bougnats auvergnats venant s’installer à Paris pour vendre charbon et vin, les Bécassines bretonnes en maisons, nourrices, bonnes à tout faire, etc.
Les Pakistanais du Raval sont arrivés il y a vingt au plus. Et les Français branchés après les Jeux olympiques.