Cette histoire est tirée du volume 1 des Histoires vraies du dedans dans le cadre des ateliers menés en 2015-2016 dans les centres pénitentiaires des Baumettes à Marseille et Toulon-La Farlède, le centre de détention de Tarascon et à la Valentine, dans l’établissement pénitentiaire pour mineurs.
À l’époque de Ceauşescu il y avait souvent des spectacles dans les stades. Autour de la pelouse, dans tous les stades de foot, il y a une piste d’athlétisme et là, on organisait des spectacles. Quelques jours avant, il y avait des affiches pour les annoncer et les gens venaient. Les stades étaient remplis, 20, 30 000 personnes pour ces spectacles de cascadeurs. Je passais à travers des voitures en feu, je renversais des voitures, on s’accrochait à des voitures en marche et on se laissait traîner derrière, je montais sur des sortes d’échafaudages, les voitures rentraient dedans et je retombais sur mes pieds… Toutes sortes de cascades de ce genre… À moto, je passais par-dessus une enfilade de voitures, et chacun de nous faisait son numéro. J’ai donné de ces spectacles dans plusieurs villes de Roumanie et je suis arrivé aussi dans ma ville natale.
Vous vous rendez bien compte qu’en arrivant dans ma ville natale, la majorité des gens me connaissaient, dans cette ville où je suis né, à la montagne, à Câmpulung-Muscel, j’étais célèbre. Le lendemain du spectacle, tout le monde parlait du “Cascadeur”, “Le Cascadeur” et jusqu’à aujourd’hui, c’est ainsi qu’on m’appelle : Le Cascadeur. Aujourd’hui encore en ville on ne me connaît pas tant comme D, que comme Dan le Cascadeur. C’était mon métier. J’ai joué dans des films. En 1984, Buzdugan cu trei peceti (film historique sur Michel le Brave)… Plein d’autres… Et je faisais ces cascades sur les stades, quand il y avait des spectacles. Ensuite j’ai été arrêté en Roumanie : j’ai eu un problème et… à cause de ça, ça a été fini, les cascades… Pour qui se retrouvait en prison, les cascades c’était fini. Et mon nom a été effacé des génériques de films.
Cascadorul, Tarascon 2016. Traduit du roumain par Laure Hinckel.