Une histoire collectée en octobre 2020 à Saint-Claude.
Transcription de l’histoire audio
“ Je m’appelle Sula, moi je ne suis pas française de souche, je suis Israélienne et je suis française parce que j’étais mariée avec un Français. En Israël, j’étais enseignante et guide, et je travaillais à l’école avec des gamins caractériels. C’était des gamins pas faciles du tout. J’ai travaillé trois ans comme ça puis j’ai pris une année sabbatique où j’ai fait guide puisque je l’avais déjà été. Pendant l’été, j’ai donc travaillé au Club Med. En 1968, mon futur mari est venu en Israël au Club Med, et je l’ai guidé. Quand ils étaient au club, les gens y restaient deux ou trois semaines, ça dépend de ce qu’ils souhaitaient.
Il y avait à peu près une dizaine de jours de voyage dans le pays pour visiter les sites importants, et en le guidant on est devenus amoureux l’un de l’autre. Pendant deux ans, on a correspondu et puis la première année où on s’est connus, je suis venu quand même visiter Saint-Claude, parce que je ne connaissais pas du tout. Il ne faut pas oublier que j’ai appris le français, c’est compliqué aussi.
En Bulgarie, parce que je suis née en Bulgarie et notre famille est montée en Israël en 1949, tout de suite après la Seconde Guerre mondiale, il y avait un collège français. Après la guerre, ils l’ont fermé. Moi, j’ai appris le français en Bulgarie pendant 2-3 ans à l’école, pas plus. Et comme après le collège était fermé, alors je n’ai plus appris le français. Alors il faut dire que je ne me suis pas mal débrouillée, même si je parlais pas très correctement les gens qui étaient au club étaient très compréhensifs. Ils savaient que le français n’était pas ma langue et puis ils voulaient que je répète que certains mots parce que ça leur plaisait le son que je faisais quand je les disait.
On a correspondu avec mon mari pendant deux ans et j’ai eu la demande en mariage par téléphone. J’étais un peu surprise, même si on s’aimait beaucoup des deux côtés, car il ne pouvait pas monter en Israël. Il ne parlait ni hébreu ni anglais, et dans son métier ce n’était pas évident puisqu’il était commerçant. Alors il fallait que je décide de venir à Saint-Claude si je voulais me marier avec lui. J’ai pas mal réfléchi et puis on a décidé de se marier et je suis venue à Saint-Claude où je me suis mariée. Ça fait cinquante ans que je suis à Saint-Claude, j’ai deux enfants et trois petits enfants. Moi qui n’était pas commerçante, je suis devenue commerçante dans le magasin qui était le « Isabelle Ménagère ». Certaines doivent savoir ce que c’était. Il y avait tout ce qu’il fallait pour la maison.
Malheureusement, mon mari est parti d’une crise cardiaque : en deux jours il n’était plus là. Il n’a jamais eu des problèmes au cœur et en deux jours il est parti. Ça fait déjà pas mal d’années, c’était pas évident du tout. Mais comme mes enfants étaient là, quand il est parti je n’ai pas voulu retourner vivre en Israël. Ma famille maintenant elle est là. Moi, je ne suis pas chrétienne, je ne me suis pas convertie parce que je me suis mariée avec un chrétien, je suis restée juive comme j’étais et je le suis toujours. ”
Sula