On savait que le métier d’attachée de presse requérait une capacité relationnelle à toute épreuve. Et voilà que l’on découvre qu’il faut aussi une belle dose de culot, surtout devant une tête couronnée !
Pendant plus de dix ans, j’ai été l’attachée de presse d’une importante maison d’édition espagnole, Plaza & Janés. En octobre 1981, nous avons publié La Guerra del Fin del Mundo (La Guerre de la fin du monde) de Mario Vargas Llosa, par ailleurs prix Nobel de Littérature 2010. Le livre a a fait l’objet d’une coédition entre Seix Barral pour l’édition de luxe et Plaza & Janés pour l’édition courante.
La promotion a été très importante vis-à-vis de la presse et des médias, et même auprès de certaines universités de Barcelone et Madrid. C’est justement à la capitale, où nous avions un emploi du temps extrêmement chargé, qu’un matin Vargas Llosa reçoit un coup de téléphone de la Zarzuela* : le Roi désire connaître l’écrivain péruvien. Très nerveux, celui-ci me demande de l’accompagner, il ne veut pas y aller tout seul. Nous prenons alors une voiture et un exemplaire des deux éditions du livre. Et à 11 heures sonnantes, nous débarquons à la Casa Real. Tout se passe très bien, la rencontre et l’entretien, et après une longue conversation arrive la pause devant les photographes.
Le roi prend alors un des exemplaires du livre pour la photo. Moi, je pâlis : il s’agit de l’édition de luxe de Seix Barral, et pas de celle de Plaza & Janés, mon employeur… « Excusez-moi, Majesté, mais je risque mon poste de travail ». Et je lui remets l’édition de Plaza & Janés avant que la photo ne soit faite. Juan Carlos rit franchement, quoique légèrement surpris par mon audace. Sur la photo finale, le roi apparaît avec les deux éditions sous le bras, mais la couverture qui est visible est celle de Plaza & Janés.
« Une image vaut mille paroles ». J’ai fait mon travail et je suis heureuse.
Mònica Piquer
* Le palais où habite le Roi.