Histoires vraies du Dedans

Mon assurance en prison, par Mihai

6 novembre 2021

Temps de lecture : 2 minutes

Cette histoire est tirée du volume 1 des Histoires vraies du dedans dans le cadre des ateliers menés en 2015-2016 dans les centres pénitentiaires des Baumettes à Marseille et Toulon-La Farlède, le centre de détention de Tarascon et à la Valentine, dans l’établissement pénitentiaire pour mineurs.


Mon frère et moi, on était petits et on se faisait quatre ou cinq magasins dans la journée, et on prenait rien, peut-être deux paquets de cigarettes, et peut-être de la monnaie pour mettre dans les machines à sous… On attendait que ça ferme et on y allait, quatre ou cinq minimum… On avait tout un trajet… Même les flics, ils nous disaient : « Ben celui-là, vous l’avez oublié ou quoi ? » et finalement on allait le casser, celui-là aussi. Ils nous indiquaient même la petite fenêtre par où on pouvait passer… Oui, ça se passait comme ça. Parce que c’est comme ça qu’ils avançaient en grade. Sur notre compte. Car on avouait tout, quand on se faisait prendre, vu qu’on savait qu’ils pouvaient rien nous faire… Jusqu’au jour où ils nous ont menés dans une maison de correction, à 12 ans. Je peux vous dire qu’avant d’y aller, on volait encore avec crainte, mais qu’au retour de la maison de correction, on a repris ça de plus belle, jusqu’à 14 ans, et quand j’ai eu 14 ans, ils m’ont fait ma carte d’identité (moi j’en voulais pas), rien que pour pouvoir m’arrêter, alors… On nous a dit « Faites gaffe, la prochaine fois c’est la prison, et là, attention, vous y risquerez votre vie ! ».

Alors qu’est-ce que j’ai fait ? Je me suis fait un magasin, j’ai fait le plein de cigarettes, je suis allé voir ma tante et je lui ai dit : « Il faut les apporter à mon oncle en prison : avec toutes ces cigarettes, il aura de quoi pour me protéger si j’arrive en taule ! »

Mihai, Tarascon 2016. Traduit du roumain par Laure Hinckel.