Une histoire recueillie à Forcalquier.
Une tourterelle turque
“ Un jour, j’étais dans mon jardin en train de le nettoyer. Je taillais les branches, je faisais de gros tas de feuilles. Deux femmes arrivent dans mon jardin, descendent mon chemin et m’abordent : « Bonjour Monsieur ! Nous sommes témoins de Jéhovah et nous propageons la bonne parole… » Enfin nous propageons, je sais plus ce qu’elles racontaient : elles me parlaient de guerre atomique. Elles me disaient que si on veut tous aller au paradis, il faut faire comme elles. Mais je leur ai dit : « Vous avez rien compris ! Il est ici le paradis ! Moi je suis dans mon paradis là ! »
La femme me regarde étonnée et à ce moment-là, il y a une tourterelle de Turquie, une jeune tourterelle de Turquie qui vient et se pose sur le tas de bois. Je tends le bras et elle vient dans ma main. Je lui dis : « Voyez, c’est ça le paradis Madame ! » Elles sont parties décomposées. Elles n’avaient rien à m’apprendre de la vie.
J’habite vers le collège, presque au bourg, dans la colline. J’ai beaucoup d’animaux sauvages qui viennent : des lapins, des renards, beaucoup de hérissons, des couleuvres, des lézards… J’ai tout vu dans mon jardin : il y a une vie incroyable. Et il y avait justement ces tourterelles de Turquie qui avaient niché dans mon marronnier. Et un petit s’essayait, c’était le hasard. Il s’était essayé à voler, mais il voletait encore et donc il était tombé sur mon tas de bois. Moi j’ai tendu la main, il m’a regardé, il est monté sur ma main. Et les deux nazes, elles étaient là, comme des connes.
Elles ne sont pas d’ici, elles sont de Manosque ou d’ailleurs, mais les témoins de Jéhovah prospectent sans arrêt dans le coin. Ils viennent régulièrement chez moi. Et à chaque fois, je les boules quoi. Moi j’en peux plus avec leur histoire d’apocalypse et tout ça. Il doit y avoir l’apocalypse tous les ans, et tous les ans c’est le même scénario de terreur pour rameuter les gens et agrandir leur secte. Donc, qu’ils aillent se faire foutre. Moi, c’est ni dieu ni maître et jusqu’à ma mort. Je fais mon chemin. Je demande rien à personne. Je veux pas qu’on m’embrouille avec les religions. J’ai ma propre foi. Je sais comment j’avance et c’est pas un témoin de Jéhovah qui va me faire la leçon. C’est peut-être moi qui pourrait leur en montrer, parce que j’ai beaucoup de choses à leur dire si j’avais du temps à perdre avec eux. Mais comme j’en ai pas, je préfère le perdre avec les mésanges, les oiseaux, les fleurs ou avec la musique. ”
Stéphane