Rostome, par Merouane

21 février 2012

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J’avais neuf ans ce jour-là quand ma maman me déposa comme chaque lundi chez ma tante pour que j’y passe l’après-midi, tandis qu’elle retournait au travail. Mon cousin Rostome, âgé de quinze ans, était lui aussi à la maison. Nous jouions ensemble de temps en temps. Mais ce jour-là, il voulait jouer à quelque chose de spécial et voulait que j’y participe.

Comme je rêvais de devenir vite grand, de sortir et traîner avec les grands, je faisais tout pour leur ressembler et avoir leur rythme de vie. Pour moi, avoir 15 ans et sortir au-delà de 18 heures était synonyme d’homme avec un grand « H ». Rostome m’avait promis de me faire rencontrer ses copains ce soir-là. Mais je devais garder un secret car les adultes ont toujours un secret, et il fallait donc que j’en garde un à mon tour pour devenir adulte. C’était mon rêve, il l’a compris et en a abusé.

L’abus n’est pas à l’échelle du rêve, mais a atteint le stade physique. Il m’a appris les attouchements, en aimant ce que je faisais, pendant que ma tante regardait son téléfilm. Une fois qu’il estimait que je maîtrisais la chose et la situation, il m’apprenait d’autres secrets et moi je me disais que je me rapprochais de plus en plus de mon rêve parce que j’y croyais dur comme fer. Des attouchements, nous sommes passés au stade de la fellation avec comme support des vidéos pornographiques (époque de Kiosque 10 sur Canal Satellite). Ma mission était de reproduire ce que je voyais jusqu’à ce qu’il me dise que je maîtrisais ce geste. Le fait de valider une étape pouvait durer des mois, et chaque lundi nous recommencions.

Attouchements et fellation maîtrisés, Rostome décida de m’apprendre l’ultime secret, limite j’allais connaitre le secret de l’univers… Ce lundi, comme par hasard, je devais passer la nuit chez ma tante. Ce fut la nuit de tous les secrets, je pense, et le pire dans tout cela c’est que j’étais content car j’avais attendu ce jour comme la venue du messie. Rostome m’avait laissé dormir dans son lit d’adulte, la joie me prit de l’intérieur, il me laissa regarder les dessins animés, mais à un certain moment il changea de chaîne. Sans transition, nous sommes passés de l’innocence à la violence (je voyais des femmes prendre leur plaisir mais elles criaient.) C’était la première fois que je regardais un film porno et il me montrait toutes les étapes que j’avais parfaitement apprises. Il me dit « Il te reste que ça » (il parlait de la pénétration), mais il ne fallait pas faire de bruit pour être meilleurs que les acteurs qu’on regardait à la TV.

Il est resté correct en me demandant si je voulais vraiment devenir adulte. Moi, sans aucune hésitation, j’ai répondu avec un OUI JE LE VEUX. Et nous l’avons fait. La première fois, ce fut horrible, mais pour moi, comme Rostome me l’avait fait comprendre, ce n’était qu’une question de douleur, l’essentiel étant que je sois enfin devenu adulte. Une fois que je maîtrisais parfaitement l’amour de A à Z, je suis devenu adulte. Nous avons continué à le faire jusqu’à ce que j’aie seize ans. Mine de rien, notre relation a duré sept ans.

Grâce ou à cause de lui, car je ne sais plus quoi dire, je suis devenu gay. Rostome s’est marié, a deux enfants, on se voit pratiquement tous les week-ends. Et moi je suis toujours à la recherche d’un Rostome qui puisse me procurer ce que je faisais étant jeune, parce que mon vrai Rostome m’a dit un jour qu’on devait arrêter et ne plus le faire. Je me connecte sur des sites de rencontre gays algériens. Je change à chaque fois de partenaire parce que je n’ai toujours pas trouvé mon Rostome.

Merouane I., Staoueli