Le baptême du touriste

20 mars 2012

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Il y a deux ans pratiquement jour pour jour, j’ai eu l’occasion d’aller visiter Pékin. Éblouie, j’avais l’impression de marcher à dix centimètres du sol tellement j’aimais la ville et ses habitants. Seulement, en tant que touriste, ça ne ratait jamais, les prix des vêtements et des objets ne passaient pas du simple au double, mais atteignaient des sommes records: il arrivait que les vendeurs multiplient les prix par huit ! Toute l’idée pour eux était de faire traîner les choses en longueur, négocier à l’infini, et au touriste de faire mine de partir, et au marchand de le retenir en ayant l’air de faire de douloureuses concessions, uniquement parce que c’est vous, cela s’entend. Etant en générale plutôt frontale, j’ai fini par ne pas acheter grand-chose.
Pour les prix, ça allait encore, par contre, ce qui m’avait quand même mise mal à l’aise était que par deux fois, je me suis faite aborder par des jeunes gens qui se présentaient comme artistes, et qui m’invitaient à les suivre pour admirer leurs œuvres exposées « pas loin du tout », juste au coin de la rue. Je m’étais montrée sèche avec eux, et la personne qui m’accompagnait me trouvait expéditive. Il aurait bien aimé discuter davantage et aller voir ce qu’ils avaient à proposer. Quelques jours plus tard, j’ai su par hasard que cette technique était un classique dans le genre, utilisée par des gens sans scrupules pour dépouiller les étrangers. D’ailleurs, ça me rappelait qu’adolescente, quand je marchais seule dans les rues de Tunis, il y avait toujours un quinquagénaire directeur d’une agence de mannequins qui insistait lourdement pour que je le suivre dans son studio pour qu’il fasse de moi une star. J’avais peut-être seize ans mais du haut de mon mètre soixante-cinq, le poisson me paraissait un peu gros.
Aujourd’hui, je reste prudente, mais je me suis faite à l’idée de laisser un peu plus de sous que je ne le souhaite en pays étranger. Je suis même devenue curieuse de voir quel scénario on va me jouer pour alléger mon portefeuille.
En tous cas, c’est à Casablanca que j’ai eu mon baptême en la matière. En sortant de l’agence Air Algérie, est venu me voir un jeune homme qui avait l’air désespéré. Il m’a raconté qu’il était venu accompagné de sa vieille maman, et qu’elle était tombée malade. Loin de sa famille, il était sans ressources. Il avait besoin de sous, et il jurait qu’il allait venir me les rendre le soir même à mon hôtel. J’ai fini par céder et lui donner 250 dirhams.
Mais le coup le plus inventif en matière d’accueil de touristes est arrivé à une personne que je connaissais et qui visitait la Turquie. C’était à Istanbul, tard le soir à la terrasse d’un café très animé, il avait fait la connaissance d’un homme d’un certain âge. Particulièrement soigné, il avait l’allure d’un gentleman. Après avoir discuté un bon moment, l’homme lui demande de lui faire la monnaie d’un gros billet. Un peu méfiant, notre touriste s’assure qu’il s’agit d’un vrai billet. Le lendemain, au moment de payer des achats, il sort le billet en question mais la vendeuse refuse de l’encaisser. Il lui demande pour quelle raison, puisque le billet est vrai, elle lui répond qu’effectivement, il est bien vrai, seulement, qu’il n’est plus en circulation depuis quelques années déjà.

Fatima – Texte / Text
Histoire racontée en français / Story written in French