Histoires vraies du Dedans

Bienfaits de l’électricité statique, par Karine

3 juin 2020

Temps de lecture : 2 minutes

Cette histoire est tirée du volume 3 des histoires vraies du dedans dans le cadre des ateliers menés en 2016-2017 aux Quartiers des femmes du Centre pénitentiaire des Baumettes à Marseille par Bruno le Dantec et Sylvain Prudhomme.

Des fois, avec la couverture en acrylique, ça fait de l’électricité statique. Quand tu frottes ta couverture et qu’après tu touches quelque chose ou quelqu’un, hop ça fait du courant. Je m’amuse à ça parfois avec les surveillantes qui me plaisent.

Comme j’aime les filles, quand il y a une surveillante qui me plaît, bien féminine comme j’aime, je lui fais la blague. Je me mets sur la couverture, je la frotte et quand elle s’approche de moi pour me donner le courrier ou quelque chose, je la touche et hop, ça fait de l’électricité. Je lui dis « oh, il y a du courant qui passe entre nous ». On se marre.

C’est dans ma nature d’avoir toujours une petite phrase comme ça. Pas avec toutes les surveillantes, hein. Mais avec celles qui me plaisent, celles avec lesquelles je sens que je peux. Parfois je regarde qui ouvre et je dis « ah, voilà mon rayon de soleil ».

Ou hier, par exemple. Je suis en détention ouverte, on peut circuler, sortir de sa cellule, aller dans les parties communes. Donc hier je sors et je vais me mettre à côté d’une surveillante. Elle me dit « Qu’est-ce qu’il y a, qu’est-ce que tu veux ? » Je lui dis « Rien, je veux rien, pourquoi ? Je suis juste venue me mettre à côté de vous, pour le plaisir ». Et on se marre.

Parfois aussi je me mets au-dessus du filet, je regarde l’étage au-dessous, celui de la détention fermée. Et je vois passer une fille qui me plaît, elle me demande « Qu’est-ce qu’il y a, tu me regardes ? » Je lui dis « Oui, je te mate ! » C’est des blagues.

Je le fais pas avec les autres détenues du quartier. Je sais pas pourquoi. Il y en a qui viennent me brancher, qui rigolent, qui me prennent les mains, qui me caressent un peu partout à travers mes habits, comme ça, pour rire. Après je suis toute… comme ça… les mains qui tremblent. Mais moi je ne veux pas. J’ai mes critères.

Quand on est jeune, on aime bien taper partout. Mais en vieillissant on se connaît mieux. Même si ça fait longtemps que…, hé ben non. Je ne sais pas pourquoi. Parfois j’aimerais bien, pourtant. Mais non.

Karine, Marseille